Le Canada a l’un des airs les plus purs de la planète. [1]
Mais en vérité, plusieurs Canadiens, particulièrement dans les centres urbains, ont de plus en plus de difficulté à respirer aisément. En 2019 par exemple, au lieu d’air frais printanier, le premier jour de la semaine de relâche de Toronto a été accompagné d’une alerte sur la qualité de l’air en raison de niveaux élevés de pollution de l’air. [2]
Nous sommes profondément préoccupés par la qualité de l’air que nous respirons. Aux quatre coins de la planète, des études de santé clinique et publique ont montré que la pollution de l’air entraine un énorme fardeau en matière de maladie ainsi qu’une augmentation des hospitalisations pour plusieurs conditions médicales.
Certains de ces impacts impliquent des problèmes respiratoires soudains, mais de plus en plus, nous observons que les maladies chroniques peuvent également se développer suite à une exposition à long terme à la pollution de l’air. Parmi ces maladies, on retrouve la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO), les maladies cardiovasculaires, le cancer et plusieurs autres. [3][6] Lors des premiers stades de la vie, une mauvaise qualité de l’air peut empêcher les poumons des enfants de bien se développer. Même avant sa naissance, un enfant peut souffrir des effets d’une mauvaise qualité de l’air puisque lorsqu’une femme enceinte est exposée à des polluants, le risque d’accoucher d’un enfant de faible poids augmente. [3]
Nous savons intuitivement que l’air pur est bon pour nous, et que l’air pollué ne l’est pas. Ce qui est beaucoup moins évident pour la plupart d’entre nous est le lien entre les changements climatiques et l’air que nous respirons. Un nombre croissant de recherches associent notre climat changeant à la qualité décroissante de l’air. Comprendre cette relation est important pour notre santé en tant qu’êtres humains. [3][4][5]
Changements climatiques et qualité de l’air
Les changements climatiques et leurs causes profondes contribuent à la pollution de l’air de deux façons. D’abord, lorsque des gaz à effet de serre causant des changements climatiques sont relâchés dans l’atmosphère, d’autres polluants dangereux le sont aussi. Ensuite, les répercussions des changements climatiques, telle une augmentation de la chaleur ou des feux de forêt, accentuent également la pollution de l’air.
Les changements climatiques sont associés à quatre polluants en particulier, lesquels peuvent affecter notre santé [6][7]:
- Les oxydes d’azote font partie des sous-produits des combustibles fossiles. Ils constituent des irritants très puissants pour les poumons et ils peuvent être transformés en d’autres types de pollution dangereuse à la suite des réactions chimiques dans l’air.
- L’ozone, lorsqu’il se trouve au niveau du sol où nous pouvons l’inhaler, est un produit chimique dangereux pouvant causer des lésions aux poumons. L’ozone cause de l’inflammation, engendrant ce qu’on appelle souvent un « coup de soleil de vos poumons ». C’est également l’un des principaux responsables du smog à grande densité que nous associons à des villes comme Los Angeles ou Beijing. Il est le produit d’une réaction chimique survenant plus facilement à des températures plus élevées. Cela signifie que plus le climat se réchauffe, plus nous pouvons nous attendre à respirer de l’ozone en plus grande quantité.
- La matière particulaire se compose de petites particules qui flottent dans l’air et peuvent provenir de nombreuses sources, tels les gaz d’échappement des voitures ou les procédés industriels. Les particules les plus fines et minuscules constituent le plus grand risque pour notre santé puisqu’elles sont celles qui se déplacent le plus loin dans les tissus pulmonaires. On prévoit que les changements climatiques feront augmenter la quantité de particules fines à laquelle nous serons exposés à cause du risque accru de feux de forêt et autres mécanismes qui libèrent des particules dans l’air, où nous n’aurons d’autre choix que de les respirer.
- Les allergènes tels le pollen et la moisissure profitent également des changements climatiques grâce aux températures plus élevées et aux saisons de culture plus longues. Les individus souffrant d’allergies et d’asthme connaissent très bien ces irritants saisonniers et les éternuements, la respiration sifflante et les yeux qui piquent qui les accompagnent. [9] Une saison des allergies plus longue permet à davantage de ces allergènes de croitre et de se propager dans notre environnement.
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Lorsqu’on parle d’ozone, c’est habituellement dans le contexte de la couche d’ozone qui se situe dans la couche extérieure de l’atmosphère, où une couche de ce gaz nous protège contre les dangereux rayons UV du soleil. Lorsqu’il se trouve à cet endroit, soit très, très loin, l’ozone est bon pour notre santé. Par contre, l’ozone peut se retrouver aussi au niveau du sol et il peut être néfaste pour nos poumons lorsque nous le respirons. [10]
La formation de l’ozone n’est pas simple : elle dépend de la présence de deux types de polluants dans l’air combinés à la lumière solaire (ou plus précisément, l’énergie provenant de la lumière solaire). Ces polluants sont :
Les oxydes d’azote, souvent appelés NOx en anglais (se prononce comme « Knocks »), sont les composés d’oxyde nitrique et dioxyde d’azote. Ils proviennent de sources naturelles comme le sol, les feux de forêt et feux de végétation, ainsi que des activités humaines comme la combustion de combustibles fossiles par les voitures et les procédés industriels. [10]
Les composés organiques volatils, plus communément appelés les COV, sont des gaz provenant de diverses sources naturelles comme les plantes, le sol, mais également de sources non naturelles comme l’essence (avant et après la combustion), la peinture et les diluants à peinture, pour n’en nommer que quelques-uns. Environ 120 produits chimiques sont classés dans la catégorie des COV et chacun d’entre eux peut servir de précurseur chimique à la création d’ozone. [10]
Plus il y a de COV et de NOx dans l’air, plus le niveau d’ozone sera élevé. [10]
L’ozone est une molécule instable qui réagit rapidement avec ce qu’elle rencontre. Ceci est utile au niveau des procédés industriels, mais nuisibles à l’humain lorsque nous le respirons, car l’ozone réagit avec notre corps pour produire des sensations désagréables et a plusieurs impacts sur notre santé. La plupart des symptômes aigus associés à une exposition à l’ozone se manifestent au niveau de notre gorge et nos poumons, par contre, une exposition prolongée à l’ozone peut également affecter le système nerveux et le système cardiovasculaire. [8]
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Au cours des derniers étés, les feux de forêt dévastateurs de Fort McMurray et de la Colombie-Britannique ont fait les manchettes des grands médias, faisant comprendre par le fait même aux Canadiens que les conséquences des changements climatiques sont bien réelles. Le ciel enfumé est devenu la toile de fond estivale pour de nombreuses municipalités. On a conseillé aux gens de rester à l’intérieur parce que les effets de la fumée des feux de forêt sur la qualité de l’air représentaient un risque élevé. (Pour en savoir plus sur l’incidence de la fumée des feux de forêt sur la santé humaine, voir l’article « La fumée des feux de forêt et les changements climatiques ».)
Pour de nombreux Canadiens, la poussière peut sembler un peu plus inoffensive que les nuages menaçants émanant des feux de forêt. Mais quiconque a presque suffoqué en raison de la poussière accumulée sur une route en gravier sec ou a vu des images du Dust Bowl des années 1930 peut imaginer les conséquences poussiéreuses des étés de plus en plus secs associés aux changements climatiques dans plusieurs régions du sud du Canada. Des niveaux d’humidité du sol plus faibles entrainent une augmentation des particules de poussière dans l’air et, par conséquent, dans notre système respiratoire. [12] Consultez notre carte des précipitations estivales pour voir les changements projetés à travers le pays.
Pollution + chaleur = risque
La chaleur et la pollution travaillent donc de pair pour nous exposer à davantage de risques, tout en nous rendant moins aptes à les contrôler. Par exemple, lorsque la température est élevée, nous avons tendance à inspirer plus d’air, ce qui signifie que nous respirons davantage de polluants.
Et lorsqu’il fait chaud, notre corps essaie de conserver autant d’eau que possible, particulièrement si l’on ne boit pas d’eau additionnelle pour aider à faire face à la chaleur. Ceci signifie que nos reins peuvent avoir plus de difficulté à expulser les toxines de notre corps via l’urine. Boire beaucoup d’eau lors de températures élevées aide donc au niveau du confort, mais également dans la gestion de notre résilience face à une mauvaise qualité de l’air. [11]
Il y a de fortes chances qu’à un moment ou à un autre, nous ayons tous subi les effets aigus de l’exposition à un air de mauvaise qualité. Les allergènes et les irritants causent souvent une toux, des éternuements, une respiration sifflante, de l’irritation à la gorge ou aux yeux, une capacité pulmonaire réduite... la liste est longue.
Plusieurs d’entre nous sont vulnérables face à une qualité de l’air qui diminue. Les enfants, les personnes âgées, les personnes atteintes d’affections respiratoires ou cardiaques préexistantes ainsi que les individus qui travaillent ou s’adonnent à des activités intenses à l’extérieur sont tous plus susceptibles de présenter des symptômes ennuyants ou dangereux causés par les polluants et les allergènes. [3]
Personne n’est à l’abri des effets de la pollution de l’air et nous serons tous vulnérables à certains moments de notre vie. Puisque la fréquence de ces évènements augmente, nous devons tenir compte de nous-mêmes, mais aussi de ceux qui nous entourent et qui sont à risque.
Prendre des mesures concernant la qualité de l’air
Demeurer informé
Vous pouvez suivre les menaces à la qualité de l’air grâce à un outil pratique de Santé Canada. La cote air santé affiche une compilation simple des risques associés à la qualité de l’air pour votre collectivité. Le nombre fourni est basé sur une échelle de 1 à 10 : plus le chiffre est élevé, plus le risque est élevé. On y retrouve également des informations sur les mesures préventives pour vous protéger. Porter attention à la qualité de l’air nous aide à planifier nos activités pour assurer notre sécurité et celle de nos êtres chers. [13]
Réduire l’exposition
Nous pouvons prendre plusieurs mesures pour réduire notre exposition aux polluants lorsque la qualité de l’air est mauvaise :
- Limiter les activités extérieures et les activités physiques ardues le plus possible. En cas de difficulté à respirer, réduire ses activités ou les arrêter tout simplement.
- Éviter les zones très polluées, telles les zones de grande circulation, lorsque possible.
- Être conscient des dangers potentiels dans l’environnement intérieur et essayer de réduire l’exposition. Fermer les fenêtres et éteindre l’appareil de chauffage et le système de climatisation s’ils aspirent de la fumée ou des irritants à l’intérieur. Garder l’air intérieur plus propre en évitant de faire de la fumée ou de brûler d’autres matières à l’intérieur. Utiliser des filtres HEPA, si possible.
- Dans un véhicule, garder les fenêtres fermées et faire circuler à nouveau l’air dans le système de ventilation.
Et consultez votre médecin de famille ou un professionnel de la santé si vous avez des préoccupations ou souhaitez obtenir davantage de conseils.
Air sain et communautés en santé
Nous pouvons tous participer à l’amélioration de la qualité de l’air dans nos villes et villages en marchant, en faisant du vélo, en prenant le transport en commun et en augmentant l’utilisation de véhicules hybrides et électriques.
Nous devons également travailler pour des changements à plus grande échelle. Nous pouvons appuyer les efforts publics et privés visant à :
- Revitaliser les forêts urbaines
- Implanter des énergies renouvelables
- Augmenter l’efficacité des options de transport en commun et actifs afin d’en faire des alternatives accessibles à la conduite automobile
- Mettre en œuvre des normes d’émissions plus strictes pour les véhicules et l’industrie
- Développer et appuyer les technologies propres
- Prendre les changements climatiques au sérieux lors de la planification future
Prendre des mesures pour améliorer la qualité de l’air peut aussi simultanément améliorer notre santé et notre bien-être, rendre nos collectivités plus vivables et combattre les changements climatiques.
References
- Global Ambient air pollution database, by country- (update 2018) World Health Organization.
- Global News, March 9, 2019, Air quality statement issued for Toronto warning of ‘high-levels’ of pollution on Saturdays
- Fiches d’information sur les changements climatiques et la santé publique. Gouvernement du Canada.
- von Schneidemesser, E. Monks, P. S., Allan, J.D., Bruhwiler L., Forster, P., Fowler, D., Lauer, A., Morgan, W. T., Paasonen, P., Righi, M., Sinderlarova, K. and Sutton, M.A. Chemistry and the Linkages between Air Quality and Climate Change. Chem. Rev. 2015, 115, 3856−3897DOI: 10.1021/acs.chemrev.5b00089
- Climate Change Decreases the Quality of the Air we Breathe. Center for Disease Control and Prevention, American Public Health Association, U.S Department of Health and Human Services
- Ambient Air Pollution: Health Impacts.World Health Organization
- Munn R.E., Brook J.R. Air Pollution. The Canadian Enclyclopedia.
- Filippidou E.C., Koukouliata A. Ozone effects respiratory system Prog Health Sci 2011, Vol 1 , No2
- D’Amato G, Bergmann KC, Cecchi L, Annesi-Maesano I, Sanduzzi A, Liccardi G, Vitale C, Stanziola A, D’Amato M. Climate change and air pollution – Effects on pollen allergy and other allergic respiratory diseases. Allergo J Int 2014; 23: 17-23 DOI 10.1007/s40629-014-0003-7
- Chemistry in Sunlight. NASA Earth Observatory
- Popkin, B. M., D’Anci, K. E., Rosenberg, I. H. Water, Hydration and Health Nutr Rev. 2010 August ; 68(8): 439–458. doi:10.1111/j.1753-4887.2010.00304.x
- Health Effects of Dust. Government of Australia, Department of Health. Health WA
- Cote air santé de Santé Canada. Gouvernement du Canada.
Référence d'article recommandée
Atlas climatique du Canada. (n.d.) Changements climatiques, qualité de l’air et santé publique. Prairie Climate Centre. https://atlasclimatique.ca/changements-climatiques-qualite-de-lair-et-sante-publique